5.1.17

" Marcher " # 6, selon Jacques Lanzmann


" Au retour de nos marches lointaines, tout nous paraît injuste parce que tout coule à flots, tout s’étale et tout s’expose, tout est à vendre et tout est à acheter. Parce que là, où les uns mettent des heures à remplir les cruches, les jarres, à les charrier de la rivière à la case, les autres n’ont qu’un robinet à tourner.
Injuste, parce que l’existence des uns ne dépend que d’une mauvaise récolte, d’un méchant coup de vent, tandis que l’aisance des autres ne dépendra jamais que d’un mauvais coup de la Bourse. 
Injuste, parce que nous, voyageurs, trekeurs,  ne savons plus, au retour, à quelle sauce dévorer notre mauvaise conscience, dans quelle sorte de répertoire nous classer.
Injuste, parce que nous sommes le symbole même de cette injustice. Parce que nous sommes allés voir chez les autres alors que ceux-ci ne viendront certainement jamais voir chez nous. "